DOSIA la mal élevée
 

Tout un tempérament, cette fougueuse jeunne fille !


Découvrez comment les gens de son environnement réagissent à ce qu’elle fait ou dit !

Quelle aurait été votre attitude face à cela ?


Découvrez cette belle histoire, vous en serez ravis !

Sommaire



Introduction

Le récit de Pierre

Le coup avec le chien Socrate

Enlever sa cousine ?

Il m’a dit de continuer

Un portrait si original

Présentation à la princesse

Elle devine

Dosia Zaptine

Chez la princesse

Le jour des régates

Leurs premières discussions

Ramener Dosia à sa famille

Rencontre imprévue

Dosia se fait gronder

Invitation

On patine

Une fête

Est-il arrivé quelque malheur ?

Un homme heureux

Chez la mère de Dosia

Au piquenique

Le sauvetage

Le lendemain matin

Conclusion



Le coup avec le chien Socrate



— Vous me croirez si vous voulez, mes chers amis, continua Pierre après avoir fait circuler le punch autour de la table. La perspective de ce mariage ne m'effrayait pas du tout.


— Parbleu ! une si jolie femme ! fit-on de loin.


— Jolie, oui, mais pas commode... une peu dans le genre de son cheval, qui ruait d'une façon si obéissante ! Mais dans ce moment-là, je n'y pensais pas. D'ailleurs, c'était l'heure du dîner.


Clémentine s'envola, je la suivis. Elle grimpait bien mieux que moi cet espèce d'escalier en casse-cou dont je vous ai parlé, et je ne la retrouvai qu'à table, tirant les oreilles à sa plus jeune soeur, qui poussait des cris de paon.


Ma tante eut beaucoup de peine à rétablir un semblant de calme dans cet intérieur agité par le vent d'une tempête perpétuelle, — au mors, s'entend. Le silence se fit devant les assiettes pleines de soupe trop grasse, que le cuisinier de ce château fait à la perfection. Ma bonne tante, qui est maigre comme un clou, se délectait.


— Oh ! la bonne soupe ! disaient-elle de temps en temps.


Ma fiancée, d'un air innocent, dégraissait la sienne par petites cuillerées dans l'assiette de son voisin, le prêtre de la paroisse, invité, ce jour-là à l'occasion de je ne sais quelle fête. Le brave homme ne s'en apercevait pas, absorbé qu'il était dans l'explication épineuse d'un litige clérical. Nous étouffions tous nos rires. Enfin ma tante s'aperçut du manège de sa fille.


— Oh ! fi ! l'horreur ! s'écria-t-elle.


— J'ai fini, maman ! répondit ma fiancée en se hâtant d'avaler son potage.


Elle posa su cuiller sur son assiette et promena sur l'assemblée un regard satisfait.


Cette conduite aurait dû me donner à réfléchir. Et bien ! non. Je trouvai Clémentine adorable. Elle ne prenait peut-être pas tout à fait assez au sérieux le changement qui s'était fait dans son existence, mais elle était si bien comme cela !


Après dîner, on joua aux gorelki. Chacun prit sa chacune, et les couples s'alignèrent. Vous connaissez ce jeu. Celui qui n'a pas trouvé de partenaire est chargé de donner le signal et de courir après les autres. Je cherchais Clémentine pour lui donner la main, lorsqu'elle apparut tenant par le collier un énorme chien de Terre-Neuve qu'elle adore, et qui s'appelle Socrate.


— Qu'est-ce que vous voulez faire de cette bête, lui dis-je.


— C'est mon cavalier ! répondit-elle en se rangeant avec son chien dans la file des couples.


— Vous ? fit-elle en me riant au nez. C'est vous qui « brûlerez » !


De fait, j'étais le dernier, et il n'y avait plus de dames. À la grande joie des gens sérieux restés sur le balcon, je pris la tête de la file et je donnai le signal en frappant des mains.


Le premier couple situé derrière moi se sépara, et passant de chaque côté de ma personne, essaya de se rejoindre en avant. Je feignis de vouloir saisir la jeune fille, mais sans beaucoup d’enthousiasme. Et le couple haletant, réuni de nouveau, retourna à la queue pour attendre son tour.


Je fis de même avec plusieurs autres. C’était Clémentine qu'il me fallait, et j'étais curieux de voir ce qu'elle ferait de son chien quand je l'aurais attrapée.


Un coup d'oeil furtif m'avertit que c'était à elle de courir. Je frappai dans mes mains : Une deux, trois ! Une boule noire passa à ma droite, un nuage blanc à ma gauche. Je me dirigeai vers le nuage blanc, mais au moment où j'allais l'atteindre...


— Pille, Socrate ! cria ma fiancée.


Socrate s'accrocha désespérément aux pans de mon surtout d'uniforme.


Je me mis à tournoyer, pensant faire lâcher prise à mon adversaire; mais celui-ci avait coutume de n'obéir qu'à un mot magique dont je n'avais pas le plus léger souvenir. Moitié riant, moitié fâché, je cessai de tournoyer, et je regardai l'assistance. Ils riaient tous à se pâmer.


Les jeunes officiers qui écoutaient ce récit ne se faisaient pas non plus faute de rire. Pierre, très sérieux, reprit son discours après un court silence.


— Clémentine s'était laissée tomber par terre et riait plus que tous les autres ensemble. Entre deux crises, ma tante, qui n'en pouvait plus, lui criait : Fais donc lâcher Socrate !


— Je ne peux pas ! répondait ma fiancée en riant de plus belle.


— Eh bien ! lui dis-je, ne vous gênez pas ! Quand vous aurez fini...


Et je tentai de m'asseoir aussi sur le gazon. Mais Socrate grommelant me tira si énergiquement, que je fus obligé de rester debout. Enfin Clémentine reprit son sérieux et dit à son chien :


— C'est bon Socrate !


L'animal docile, desserra les dents et vint se coucher près d'elle. C'est comme ça qu'elle élevait les bêtes.


Les officiers applaudirent vivement à la péroraison de leur camarade.


— Après ? après ? cria-t-on de toutes parts.


Pierre promena sur l'assemblée et reprit :


— Il n'y eut pas moyen de parler avec elle ce soir-là. D'ailleurs je lui gardais un peu rancune du procédé du chien. J'allai donc me coucher en me promettant de lui faire entendre raison quand elle serait ma femme.


Le lendemain matin, il n'était pas encore sept heures, j'entendis une pluie de sable, mêlé de fin gravier tomber contre mes vitres. Je sautai à la fenêtre, je l'ouvris et j'entendis un éclat de rire s'enfuir au loin sous les grandes allées du vieux jardin. Je fus vite habillé et vite arrivé au fond de ce mystérieux fouillis de verdure... Rien !


Je cherchai dans tous les bosquets, dans toutes les retraites... Rien !


Et de temps en temps un rire argentin me défiait à travers les charmilles.


Enfin, comme je commençais à avoir envie de retourner à la maison prendre mon café, — car j'étais à jeun, — je vis, entre deux alisiers, le visage mutin de ma fiancée. Je bondis vers elle, et non sans me piquer un peu les doigts, je la saisis par la taille.


Ah ! mes amis ! je n'avais pas eu le temps de sentir palpiter son coeur sous ma main, que je reçus… j'en rougis jusqu'à mon dernier jour... je reçus un soufflet maître !


Pierre, penaud, regarda son auditoire, qui manquait absolument de gravité. Le comte Sourof souriait d'un air content.


— Ah ! ça vous amuse ! reprit le héros de la fête. Eh bien ! moi, ça ne m'amusa pas. Ce n'est pas gentil, lui dis-je. Est-ce qu'un fiancé n'a pas le droit d'attraper sa fiancée quand elle lui fait des niches ?


— Non ! me répondit-elle toute rouge de colère. Et si tu recommences, je le dirai à maman.


— Mais ma chère, quand nous serons mariés...


— Eh bien ! fit-elle avec un aplomb qui me renversa, ce n'est pas une raison pour être grossier, quand on est marié ! Jeu de main, jeu de vilain !


Elle me tira la langue, messieurs. Elle me tira positivement la langue et me tourna le dos. Je ne tentai pas de la suivre.

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